ASSOCIATION FÉCAMP TERRE-NEUVE
Etienne Bernet / © Édition Association Fécamp Terre-Neuve
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Le canot Chatauvillard sur la plage d'Yport à côté des caïques.
© coll. particulière, D. R.
En 1883 la Société Centrale de Sauvetage des Naufragés implante à Yport une station de sauvetage financée grâce à d'une dotation faite par le comte Robert de Chatauvillard, disparu en 1880, dont l'embarcation portera le nom, et à une souscriptions recueillies par Jean Helie, ancien adjoint au maire de la commune.
C'est le dimanche 7 octobre 1883 que se déroule l'inauguration de la nouvelle station et la cérémonie de bénédiction du canot par le curé d'Yport qui prononce une allocution dans laquelle il fait remarquer la distinction entre le baptême habituel des bateaux de pêche et celui assez particulier d'un canot de sauvetage. En effet, le blé, signe d'abondance, est mêlé au sel pour les premiers, mais n'est pas répandu sur le pont pour les seconds qui ne servent qu'à des actes de dévouement. Il fait ensuite un chaleureux éloge des sauveteurs : " (…) qui vont au péril de leur vie lutter contre l'océan lui arracher ses victimes ". Mais, toutes les dispositions nécessaires au lancement du canot n'ayant pas pu être prises à temps, la première mise à l'eau ne se fera qu'une quinzaine de jours plus tard.
Le canot Le Chatauvillard est le canot n° 39 des chantiers Augustin-Normand du Havre, canot en bois à rames et à voiles, redressable, long de 10,10 m, large de 2,27 m pour un creux de 0,975 m. L'équipe de sauveteurs compte vingt-huit hommes, conduits par le patron Hippolyte Vatinel. Comme les conditions de mise à l'eau sur le perré d'Yport ne sont pas très bonnes, les roues arrières du chariot sont munies de " Plat-way ", système de plaques métalliques qui viennent en surépaisseur sur le bandage des roues, ils sont destinés à améliorer le passage dans les galets. À l'usage, ce système se révélera peu satisfaisant. De sa mise en service en 1883, jusqu'en 1932, le canot Le Chatauvillard a assuré dix-sept sorties de sauvetage et la station d'Yport a connu plusieurs patrons, : Hippolyte Vatinel, Albert Vatinel, Tranquille Legros, Olive Ébran et Eugène Ébran, dit " gros pêqueux ", etc.
En 1940, le canot Le Chatauvillard est conduit à Fécamp par le patron Eugène Ébran et son fils François. Les Allemands l'utilisent pour des exercices et l'échouent devant Yport, sous le Chicard. En dépit des avaries subies, le bateau est ramené à Fécamp où il est confié aux chantiers Argentin. En 1945, à Fécamp, en attendant des jours meilleurs, on envisage d'utiliser le canot d'Yport, bien qu'en très mauvais état. Mais son utilisation pose plusieurs problèmes, notamment pour la mise à l'eau à cause du manque d'eau dans le port à la basse mer. Dans un courrier du 15 novembre 1946, à la Société Centrale, M. Paul Houmard, président du Comité Local de sauvetage, écrivait : " (…) le patron Mignot fait remarquer, à juste titre, que la sortie du port, par vents dominants de S-O à N-O est très difficile et qu'il serait préférable que le canot soit rétabli à Yport, mieux protégé contre le gros temps d'Ouest. En plus, le recrutement d'un équipage, à cette époque de motorisation à outrance, serait plus facile (…) ". Dans ces temps de pénuries, on envisage tout de même sérieusement de le remettre en état, mais le projet est finalement abandonné ; il ne sera pas réparé.
Note : un autre canot a porté le nom de Chatauvillard à Honfleur, de 1885 à 1908.