ASSOCIATION FÉCAMP TERRE-NEUVE
Etienne Bernet / © Édition Association Fécamp Terre-Neuve
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L'Ange amarré à l'île des Cygnes à Paris en 1935. © D. R.
L'Ange, voilier de grande pêche
L'Ange,, trois-mâts en bois à pont unique de 400 tonneaux de jauge brute, 580 tonnes de portée en lourd, long de 46,00 m, large de 6,60 m pour un creux de 4,80 m, construit à Saint-Malo, en 1897 par les Chantiers Gautier père, pour l'armateur fécampois Tranquille Monnier. Il est lancé le 11 octobre, et quitte Saint-Malo pour Fécamp le 16 décembre. Il y est francisé le 24 décembre 1897, Le nouveau navire porte sur son tableau arrière le nom de L'Ange, avec un « L » majuscule.
Ce beau navire « fort en bois », va faire consécutivement trente-trois campagnes de pêche sur les bancs de Terre-Neuve : huit campagnes (1898-1905) pour l’armateur Tranquille Monnier, cinq (1906-191) pour MM.MMortier et Buttard, trois (1911-1913) pour les Sécheries de morue de Fécamp, treize (1914-1926) pour La Morue Française et les Sécheries de Fécamp, quatre (1927-1930) pour La Morue Française.
Dix-sept capitaines l’ont commandé : Lefauve (1898-1900), Gavini (1901), Paul Hauchecorne (1902-1903), Léhot !1904-1905), Louis Hébert (1906), Lecointre (1907-1909), Charles, Dehayes (1910-1913), Henri Heuzé (1914), Paul Duboc (1915), Charles Dehayes (1916), Célestin Jeanne (1917), Guéroult (1918-1920), Marcel Ledun (1921-1922), Besnard (1923), Ernest Cahard (1924-1925), Eugène Desjardins (1926-1928) et Léon Allais (1929-1930).
Comme tous les navires terre-neuviers, L’Ange eut ses malheurs et on compte neuf décès à bord ou disparitions en mer lors de ses campagnes : le 27 juillet 1902, en pêche sur les bancs il recueille un doris de la Mésange, un voilier de Fécamp, avec deux hommes à bord. Mais les dorissiers se noyèrent en repartant pour gagner leur bord. Le 6 avril 1904, en pêche il perd un doris avec deux hommes disparus en mer. Le 1er septembre 1907, un homme meurt à bord puis, à l'arrivée sous Belle-Île, il doit débarquer deux hommes atteints du scorbut dont un meurt à l'hôpital. Le 8 septembre 1910, le matelot Joseph Palfray d'Yport meurt en mer. En 1915, L’Ange est armé pour Terre-Neuve et, le 20 mai, le cuisinier Pierre Conan, de Lanvollon, décède, le capitaine Paul Duboc est accusé de brutalités à son égard. Dubosc, âgé de 39 ans, avait été mobilisé en septembre 1914 et mis en sursis pour commander le terre-neuvier. Étant militaire, il est jugé par le conseil de guerre de Rouen et, condamné à six jours de prison ferme, il est envoyé au front. Le 10 mars 1929. Le matelot Duflos, de St-Valéry en Caux disparaît en mer.
L’année 1930 marque la dernière campagne de L’Ange rentré du Groenland le 13 octobre, sous le commandement du capitaine Allais. Il comptait trente-trois campagnes sur les bancs sans aucune interruption. Dégréé, manœuvres dépassées il reste désarmé à Fécamp, à couple du Suffren, où il sert de magasin et d'entrepôt de sel pour La Morue Française.
L'Ange, navire-école à Paris
En 1935, La Morue Française, devenue Compagnie Générale de Grande pêche, vend le navire à la Sté La Frégate, créée par MM. A. Fiand, et le capitaine de vaisseau Robert Lecoq, société dont le but est : « (…) l'éducation physique et la préparation maritime des jeunes gens attirés par la mer (…) ».
- L'Ange quitte Fécamp le 20 mai en remorque jusqu'à Paris, démâté avant son départ de Fécamp, il est regréé une fois à destination. Le 26 mai 1935, il est amarré à l'île aux Cygnes en aval du pont de Passy, côté port de Grenelle. Des travaux de transformation sont réalisés pour répondre à sa nouvelle utilisation : un entrepont est construit, des sabords sont ouverts et diverses installations sont érigées sur le pont, gâchant la silhouette originelle du navire. Désaccord ou mésentente, entre temps la Sté La Frégate est devenue La Corvette. En septembre La Pêche Maritime, informe de l'ouverture prochaine de l'école : « (…) pour donner une instruction pré-maritime aux jeunes Parisiens ». Le 2 octobre, c'est la première rentrée des jeunes mousses, sous la direction du commandant Robert Lecoq.
En 1936, la revue Le Yacht signale que le navire doit être déplacé à cause des travaux préparatoires à l'exposition universelle : « (…) ce qui donne un cachet maritime à ce coin charmant, c'est la mâture de L'Ange, ce morutier amené de Fécamp devenu navire-école. On a décidé de le déplacer et le quai d'Auteuil lui est assigné (…) Ce sera grand dommage. ». Malgré cette supplique, L'Ange doit partir pour être amarrer au quai du Point du Jour à toucher le viaduc d'Auteuil. En 1940, l'enseignement des mousses est maintenu jusqu'à ce que Paris soit occupé, mais l'école n'ouvrira pas en octobre, en partie à cause de l'absence d'élèves. L'Ange est condamné, et Le Petit Parisien du 22 mai 1941 en rend compte : « Le trois-mâts "Ange", ancien terre-neuvas qui servait d'école de matelotage, va quitter le quai d'Auteuil (…). Déjà ses grands mâts qui se profilaient si gracieusement sur le ciel de Paris ont été abattus pour permettre son passage sous les ponts de la Seine (…) C'est un entrepreneur, Monsieur Portaler, qui l'a acquis pour le détruire à Saint-Denis (…). Le trois-mâts est dépecé en 1941, peut-être pour faire du bois de charpente mais, plus vraisemblablement pour servir de bois de chauffage.
Triste fin pour ce beau navire dont la longévité aura été remarquable