ASSOCIATION FÉCAMP TERRE-NEUVE
HENRI DE MONFREID
1 8 7 9 - 1 9 7 4
« Dans mes tournées à travers le pays de Caux, ce verdoyant plateau, j'aperçus la mer dans l'échancrure d'une vallée, aussitôt je vins au bord de la falaise contempler les eaux verdâtres de la Manche.
Je m'arrêtai longtemps à écouter le ressac en suivant des yeux les traînées d'écume que le jusant emporte au large, avec les barques de pêche aux voiles tannées, couleur de feuille morte.
Cette bouffée d'air marin éveilla tout à coup une impérieuse nostalgie. La voix de la mer m'appelait, comme le chant des sirènes.
Le soir j'allai coucher à Fécamp.
La vie maritime de ce petit port de pêche, son odeur de goudron et les relents des usines de salage achevèrent de me détacher de la vie parisienne ; c'est là qu'il me fallait vivre.
Je me fixai donc à Fécamp ; je louai une petite maison sur le port et à peine installé j'achetai une barque.
Elle n'était destinée évidemment qu'à d'innocentes promenades le dimanche, mais peu à peu, à cause de l'heure des marées, du vent, ou pour d'autres raisons maritimes, je partis le samedi soir d'abord, puis le vendredi pour ne revenir que le lundi. J'inaugurai en quelque sorte le week-end actuel.
Le père Fromentin, terreneuva retraité, venait avec moi. J'étais déjà assez marin pour me méfier de la mer et de la Manche en particulier avec qui on ne badine pas.
Grâce à l'expérience de ce vieux pêcheur, je m'initiai aux secrets d'une navigation difficile dans ces eaux perfides, alternativement balayées par des courants de plus de quatre nœuds. J'appris à me servir de cette force naturelle pour m'en aller en pleine mer, à plus de trente milles au large et revenir avec le courant inverse à mon point de départ. Enfin j'achetai un vieux moteur d'automobile, je fondis moi-même une hélice en alliage d'imprimerie et réalisai ainsi la navigation mixte. Par temps calme, ma barque filait ses quatre nœuds, ce qui émerveilla la population maritime.
Je fus ainsi un peu précurseur, car beaucoup suivirent mon exemple. »
Citations extraites d'un ouvrage écrit en 1968 : "l'Escalade", 10e et dernier tome de la série "l'Envers de l'Aventure", qui raconte sa vie avant son départ pour l'Afrique en 1911.
Il résumera cette série dans "le Feu de Saint-Elme" (1973), ouvrage encore édité actuellement sous le titre de "Mes Vies d'Aventure", qui raconte sa vie complète.
A cette époque, Monfreid était encore un inconnu. Il n'avait pas commencé sa carrière d'Aventurier de l'Afrique, encore moins celle d'écrivain.
Ce n'est qu'en 1911 qu'il partira pour l'Ethiopie, et ce n'est qu'en 1932 que sortira son premier ouvrage "les secrets de la Mer Rouge".
On ne sait pas exactement quand il arrive à Fécamp : 1907 ? 1908 ? Ce qui est sûr c'est qu'il part au milieu de l'année 1909.
Comment se termina l'histoire à Fécamp ?
Voici cet extrait du "Feu de Saint-Elme" :
« Écœuré de toutes ces intrigues, et hanté par le désir d'être mon maître, je donnai ma démission... encore une fois !
Je gardai le logement où j'avais installé ma famille a Fécamp, et je crois bien que dès lors, l'appel de la mer me détacha de l'industrie laitière.
Les dundees de pêche et les goélettes partant au printemps pour l'Islande ou Terre-Neuve, n'avaient pas été étrangers à mon besoin d'évasion.
Je me préparais donc à passer l'examen de capitaine au long cours, quand le père Korn, en ce temps-là se disant mon ami, me proposa une petite laiterie au lieu-dit de Trois Moulins, à deux kilomètres de Melun. »
REMERCIEMENTS
Nous empruntons cette page au Forum du Bout-Menteux qui propose plusieurs pages intéressantes sur Monfreid
auxquelles nous vous conseillons de vous reporter.